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Un homme-oiseau tente la traversée de la Manche

Un homme-oiseau tente la traversée de la Manche

>Société|jérôme sage Jérôme Sage|12 juin 2017, 21h32|0

Karim Dadda, 36 ans, sera «le premier Africain à traverser la Manche en paramoteur».

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jérôme sage Jérôme Sage

SociétéKarim DaddaManchedétroit de Gibraltar

 

Karim Dadda, 36 ans, s’élance ce mardi à 9 heures avec un paramoteur. Un drôle de parapente avec un petit moteur dans le dos. Moins simple qu’il n’y paraît.

C’est lui qui le dit : Karim Dadda, 36 ans, sera «le premier Africain, le premier Marocain à traverser la Manche en paramoteur». Il s’élancera ce mardi matin, vers 9 heures, de l’aérodrome de Saint-Inglevert, à l’ouest de Calais, pour rejoindre celui de Clipgate, entre la côte anglaise et Canterbury. Avec une voile de parapente, un propulseur à hélice dans le dos, son courage et sa passion. Il compte rejoindre sa destination en une heure si tout va bien.

 

«Drogué» au paramoteur

 

Pourquoi ce défi ? «Il y a un an, confie le technicien de métier, nous avions organisé une traversée du détroit de Gibraltar, pour joindre le Maroc, mais ce pays a refusé de donner l’autorisation... Et comme je suis passionné par l’histoire du débarquement de Normandie, aussi bien pour ce qui est de l’héroïsme des soldats que des prouesses logistiques d’un tel évènement, ça m’a semblé une bonne manière de marquer le 73e anniversaire de cette date historique» Hélas, le 6 juin, le vent était trop fort. Tout comme le 9 juin. «Il y avait un vent de Sud-est, qui soufflait à 35 km/h. C’est beaucoup trop, l’idéal est un vent de 5 à 9 km/h, en tout cas inférieur à 20 km/h».

 

Le jeune homme se dit «drogué» au paramoteur. «Je voulais préparer le brevet de pilote privé», permettant de piloter de petits avions de tourisme, «mais c’était trop cher. J’ai essayé l’ULM, l’autogire (NDLR : un engin léger aux airs d’hélicoptère), mais c’est le paramoteur qui m’a le plus séduit. Dès que j’ai un moment, je décolle !»

 

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Six mois de préparation

 

Ils sont une poignée à avoir réalisé cette expédition. En 2016, Sacha Dench, biologiste anglaise, participant a une expédition suivant la migration des cygnes de Bewick depuis le nord de la Russie, avait été la première femme à traverser le Channel ce drôle d’engin sur le dos. Si Karim précise être le premier Marocain à se lancer, c’est «une fierté, et pour montrer autre chose des musulmans» en des temps où l’actualité donne souvent à l’Islam un visage effrayant. Avec le club Grand Vol Paramoteur, dans le Val-d’Oise et la Fédération française, ils ont réuni les quelque 2000 euros de budget, et préparé la traversée pendant 6 mois. En jeu, la sécurité - et donc l’affrêtement d’un bateau suiveur -, sans oublier le respect de la réglementation, très stricte en matière d’objets volants. Le plan de vol de l’homme-oiseau a ainsi été communiqué à la Direction générale de l’aviation civile (DGAC). S’il réussit, son défi, il en entamera d’autres. à commencer par celui qu’il avait dû abandonner : franchir le détroit de Gibraltar, porte de la Méditerrannée.

 

L'éternel horizon des explorateurs 

 

Malgré la technologie qui repousse les limites et les horizons, la Manche reste le terrain d’essai de nombreux défis. Justement, un autre objet volant innovant prendra le ciel quelques heures après Karim. Une voiture volante, premier véhicule homologué à la fois pour la route et les airs : le projet Pégase. Une sorte de buggy, équipé d’une voile et d’un ventilateur - un paramoteur, en somme - permettant de réaliser cet exploit, joindre Paris à Londres par la route sans emprunter un ferry-boat ou le tunnel sous la Manche. Le véhicule, en dehors de ses usages récréatifs, intéresse déjà largement les forces de sécurité pour la surveillance de frontières par exemple, ou les militaires des forces spéciales, qui disposeraient d’un moyen d’infiltration peu bruyant, léger, capable d’évoluer en terrains difficiles.

 

En 2015, c’est l’avion électrique E-Fan, conçu par Airbus, qui montrait ses capacités au dessus de la Manche, cette quarantaine de kilomètres d’eau qui signifie tant. En 2008, le pilote suisse Yves Rossy y déployait son aile rigide à réacteurs, lâché d’un avion, pour rejoindre en quelques minutes les côtes anglaises à 200 km/h. Depuis, le «jetman» a fait du chemin, volant entre autres en formation avec un A380, des avions de chasse, au dessus du grand Canyon ou à Rio de Janeiro. En 1909, c’est encore au dessus de la Manche que Louis Blériot inaugurait l’âge d’or de l’aviation. Jean-François Pilâtre de Rozier, l’un des aéronautes pionniers de la navigation en ballon, est mort en tentant de marquer les esprits de part et d’autres de la Manche en juin 1785, dans une traversée en ballon qui a tourné au drame.

 

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