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Le paramoteur n’est pas facile et le paramoteur ne pardonne pas tout !

Le paramoteur n’est pas facile et le paramoteur ne pardonne pas tout !

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Une contre-vérité circule depuis longtemps déjà sur les terrains, lors des rassemblements, des salons-expo… comme quoi le paramoteur serait « super simple et facile ».

LE PARAMOTEUR N’EST PAS FACILE ET LE PARAMOTEUR NE PARDONNE PAS TOUT !

On sait, quelque soit l’aéronef, qu’un accident survient par une accumulation de facteurs. Un cas typique ; un pilote essaye une nouvelle aile, dans des conditions aérologiques calmes. Tout se passe bien. La même situation en conditions turbulentes, et le pilote a un accident. Ce n’est pas l’aile qui est en cause, pas plus que l’aérologie, mais l’addition des deux ou l’un avec l’autre. Dans les mêmes conditions turbulentes mais avec son aile (qu’il connaît parfaitement depuis ces années), le pilote effectue son vol normalement.

Autre cas possible, le pilote essaie un nouveau moteur, une nouvelle aile sur un site qu’il ne connaît pas et il a un rhume (si, si, c’est possible). Il décolle mais décroche à 10 m/sol et s’explose. La tête embrumée (il a toujours le rhume…), il met du temps à se rendre compte que le couple moteur est bien plus fort que celui de sa machine (en plus il est mal assis) et l’entraîne vers la rangée d’arbres. Il corrige mais le débattement ne correspond pas à la mania qu’il obtient normalement. Ça se rapproche… Gaz à fond il plante le frein (comme il fait sur la sienne) et essaye de se jeter dans la sellette. Pas beaucoup mieux assis mais la main est descendue encore un peu plus bas pendant la balançoire et… terminus, tout le monde descend ! Exagéré ?… Mais plausible. Tout autant que le fait d’enlever un de ces facteurs aboutit à une autre issue : il se tape un super vol. Il n’est pas groggy et percute tout de suite à 1m/sol que ça part fort, relâche alors un peu les gaz et tente de s’installer. Ça va et il s’envole ou décide de s’arrêter. Il décolle avec son propre moteur et parvient à s’installer de suite après l’envol. Du coup, pilotage plus actif. Ça se passe bien également avec sa propre aile qui est moins sensible au couple moteur.

Parmi tous ces facteurs, il y a ceux que l’on maîtrise et les autres.

Depuis quelques années, plusieurs d’entre eux ont évolué sans que le milieu (théorique, pratique, professionnel, institutionnel) s’y adapte aussi rapidement.

1 – le contenu des formations,

2 – l’apprentissage des pilotes,

3 – l’évolution du matériel,

4 – la démocratisation des pratiques,

5 – la pratique des champions.

1 – Je ne vais sûrement pas remettre en cause globalement le niveau de formation des instructeurs. Mais à force de se balader sur les terrains et de discuter avec les pros et les pilotes, on se rend compte tout de même qu’un certain nombre d’instructeurs ont obtenu leur diplôme suite à une formation incomplète. Peu ou pas de formation pratique, peu ou pas de formation pédagogique en situation, c’est-à-dire avec de « vrais » élèves, sur le terrain, pour un stage complet, des premières séances de gonflage jusqu’à l’obtention du brevet. Du coup, un instructeur de niveau moyen ne peut faire aboutir ses élèves qu’à un plus faible niveau…

2 – Dans un second temps, les pilotes, une fois brevetés, pensent que la phase d’apprentissage est terminée. On le constate par le faible nombre qui fait la démarche de suivre un stage de perfectionnement.

Ils pensent que leur niveau d’autonomie suffit pour aller voler chez eux mais aussi ailleurs, quelque soient les spécificités des sites de vol ou les conditions aérologiques.

Plusieurs raisons peuvent expliquer en partie ce fait ;

– la formation dispensée (on l’a vu) qui fait douter que ces instructeurs proposent du perf,

– la pratique du paramoteur à « domicile », ce qui est plutôt exceptionnel, puisque toutes les autres activités aéronautiques se pratiquent sur sites ou sur pistes club-école (hormis l’hélico, la montgolfière…). Ça isole et classe le paramoteur en sport individualiste (ce qui est en même temps un de ces attraits). Le pilote, tranquille, au fond de son jardin, peut vite avoir l’impression qu’il est le Calife du département…

Alors qu’il y a des avantages à se retrouver sur site (encadrement, conseils, essais de matériels, échanges d’expériences, émulation, sorties…).

– l’attrait même du paramoteur, par sa simplicité de mise en place, ne nécessitant pas d’infrastructure, son faible encombrement, son prix… qui amène des piétons à cette activité avec pour seule envie de se faire une petite balade autour de chez eux, le soir après le boulot ou le samedi matin (pas le dimanche c’est poulet chez la belle-mère), tranquillement et simplement.

Cette utilisation du paramoteur n’est absolument pas méprisable, chacun pratique son « sport » comme il l’entend et pour ce que cela lui procure. Mais certains peuvent considérer rapidement qu’ils n’ont pas besoin d’en apprendre plus vu comment ils utilisent l’aéronef.

3 – La mutation du matériel, et surtout du parapente dédié au paramoteur, a été en peu de temps considérable. Tout le monde connaît parfaitement le terme de profil « Reflex » mais combien sont capables d’en énoncer les principes théoriques (construction des profils, conséquences aérodynamiques aux différents régimes de vol, trimmé et détrimmé, comportements en fonction des actions de pilotage, nuances entre profils « semi-Reflex », « 100% Reflex », etc). Combien savent précisément comment utiliser ces nouveaux profils, comment les piloter, dans quelles conditions, ce qu’il ne faut pas faire, quelles en sont les limites ?

Ces nouvelles ailes représentent un progrès indéniable pour le paramoteur. D’une vitesse moyenne de 40 km/h, on est tout de suite passé à des vitesses supérieures à 50, voire 60 km/h. Cela permet de parcourir plus de chemin pour une même durée et de voler avec du vent plus fort, donc de sortir plus souvent, tant mieux. A contrario, ce que le corps humain peut encaisser comme choc à 40 km/h n’est plus forcément vrai à 60. Les lésions sont de suite plus nombreuses et graves.

Or le discours « plus ça tape, plus faut détrimmer et laisser l’aile se débrouiller sans rien toucher » ne suffit pas et ne convainc pas !

S’il est vrai que le principe du Reflex est de créer un profil auto stable (et cela fonctionne), le manque de connaissances théoriques et pratiques est flagrant. Les laboratoires de tests en vol et d’homologations sont parfois tombés dans une impasse en testant certaines ailes. Par exemple, la fermeture asymétrique est difficile, voire quasi-impossible à provoquer. Et quand le pilote y parvient, l’aile part avec une telle rapidité et brutalité qu’il faut de l’expérience pour enrayer rapidement l’incident. Ceci n’est pas une généralité mais les cas relatés dans ce sens sont multiples.

Tous les acteurs portent sûrement une part de responsabilité de cette situation. Les fabricants, qui n’ont pas assez informés et éduqués les vendeurs et les pilotes, par l’organisation de stages dédiés. Les importateurs et distributeurs, qui pour ces mêmes raisons n’ont pas tous les éléments pour pouvoir conseiller précisément. Les instructeurs, qui sont souvent les vendeurs de matériels, qui ne peuvent avoir un discours que limité et superficiel. Les média, qui relaient la promotion de ces nouveaux parapentes, mais en s’attachant plus aux qualités de vol (principalement la vitesse maxi) qu’aux comportements induits par de mauvaises manipulations ou en cas de sorties du domaine de vol (et pour cause).

4 – D’autres pratiques ont connu également le succès en peu de temps, et notamment le chariot. Aujourd’hui, la plupart des machines sont abouties ; bien équilibrées, centrées, stables, confortables… Décoller sur des roues peut paraître plus simple ; on n’a pas à porter le poids, on n’a pas à courir, on peut gonfler et partir vent de travers, on peut tenter 5 décollages de suite sans s’essouffler… Mais le chariot requière néanmoins des techniques spécifiques, différentes de celles nécessaires au déco à pieds.

Beaucoup succombent aux gros chariots biplace pour emmener la famille (et les enfants en premier), les voisins, les copains… Faire partager ces moments à ceux que l’on aime est évidemment un acte des plus honorables et gratifiants. Mais justement si on les aime, est-ce que l’on a vraiment toutes les cartes en main pour le faire en toute sécurité ? Es-ce que l’on peut prétendre avoir assez d’expérience et de technique pour prendre soin (et ramener en bon état au sol) ceux qui nous sont proches ? Quel que soit les particularités du site de décollage ? Des conditions météo du jour ?

Encore une fois le discours tant entendu fait froid dans le dos « le chariot (surtout biplace lourd) c’est super facile car c’est lourd, stable et la voile n’a pas d’autres solution que de suivre le chariot tellement c’est lourd et stable… »

Décoller sur 2 roues, quand le geste est maîtrisé, c’est beau ! Quand c’est involontaire, ça peut vite tourner à la cata !

5 – La pratique et les évolutions des pilotes de « haut niveau » ont également radicalement changé. Que ce soit en voltige où maintenant dans pratiquement chaque pays, un ou plusieurs pilotes passent des tumblings avec un moteur dans le dos. Ou grâce à la forte croissance de popularité des compétitions de maniabilité comme Slalomania, Fly Games ou Parabatix.

L’engouement pour ce nouveau type de pratique est évident. Les pilotes sont de plus en plus nombreux, ils apprécient ces runs, s’entraînent pour ça et adaptent leur matériel spécifiquement. Quant au « grand public » il suffit de voir le nombre de vidéos visionnées.

Si on reprend donc maintenant chaque facteur et qu’on les accumule, on aboutit à augmenter significativement les causes et les chances (risques) d’accident.

Le pilote breveté a reçu une formation ric-rac, il vole seul dans son coin, ne cherche pas à se perfectionner, avec du matériel dernière génération (dont il ne connaît pas vraiment les limites), dans des conditions de plus en plus fortes (vu que son aile tient le pavé comme nulle autre) et qu’il veut faire comme les champions (vus devant les écrans), à enrouler du pylône (ou à défaut l’arbre au fond du terrain).

Ces nouvelles technologies et formes de vol peuvent faire évoluer l’activité dans le bon sens. Il faut prendre conscience des différents paramètres, les analyser et mettre en place de nouveaux outils, méthodes et procédés pour s’y adapter.

La FFPlUM a déjà ouvert le chantier de la refonte du cursus instructeur.

Les pilotes doivent prendre conscience que l’apprentissage ne s’arrête pas aux 15 ou 30 vols qu’ils ont pu faire à l’école. Pour progresser il faut apprendre. De plus en plus d’instructeurs et même de pilotes reconnus proposent des stages perf (thermique, pilotage, navigation, mania…). Ça ne dure souvent qu’une journée ou deux et le pilote rentre chez lui en ayant découvert une nouvelle technique de décollage ou comment bien maîtriser le flair. Il affine la précision de son pilotage après un stage en soaring. Dans tous les cas, on acquiert de l’expérience qui se convertit en une prise de risque moindre.

Le stage SIV est une autre occasion de progresser. En libre, avec plus de 700 m de gaz au-dessus de l’eau, un gilet, un bateau et tout ce qui va bien, le pilote découvre les réactions de son aile poussée hors de son domaine de vol et apprend surtout les actions adéquates (le bon geste au bon moment). Une fois rentré, le pilote comprend mieux par exemple pourquoi son aile réagit en tangage et comment en limiter les effets.

De plus en plus de professionnels échangent sur cette évolution du matériel, sa compréhension, proposent et cherchent des méthodes d’enseignement mieux adaptées, nuancent leur discours.

Il faut continuer à vouloir imiter les sportifs, les pros. Mais il faut considérer la part de travail, d’exercices, d’entraînement et de temps que cela implique. Ils changent et essaient le plus possible d’équipements différents, testent ou bidouillent de nouvelles techniques. Ils vont découvrir ou pratiquer de nouvelles activités (parachutisme, parapente, pendulaire…). Et participent à des stages, SIV par exemple (comme la majorité des pilotes de l’Équipe de France).

Le paramoteur, s’il peut être considéré comme un loisir, n’en reste pas moins une activité aérienne. Cela implique que le corps n’ayant plus de contact avec le sol peut retomber à terre plus vite qu’il ne s’est élevé. Et, à partir du moment où les pieds sont à 1 m du sol, le risque de tomber et de se faire mal augmente.

Le pilote est maître de ses choix et de ses décisions. Quelques règles fondamentales abaissent directement la position du curseur risque :

– être en forme physiquement mais aussi mentalement,

– voler avec une aile qui correspond à son niveau d’expérience,

– voler dans des conditions aérologiques adaptées à son niveau,

– entretenir son matériel,

– rester humble et assumer ces décisions,

– savoir renoncer si une de ces conditions n’est pas remplie.

Cela peut paraître banal et évident. Pourtant, à combien de reprises des pilotes ont décollé alors qu’au moins un de ces facteurs était dans le rouge.

La prise de risque comporte des côtés positifs car on évolue avec une certaine marge d’incertitude. Elle permet de rechercher les (ses) limites, favorise l’aventure, construit son identité en se démarquant, augmente la maîtrise de soi et des ses possibilités, son autonomie. Cela peut être un style de vie, une recherche de sensations, de stimulations, de partage d’émotions.

Jouer avec le danger est une nécessité, si l’enjeu n’est pas de mourir mais au contraire de se sentir « vivre ».

 

José ORTEGA

Novembre 2012

http://www.paramoteur64.com/blog/le-paramoteur-nest-pas-facile-et-le-paramoteur-ne-pardonne-pas-tout/

 

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